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Xavier Niel : « Free a réinventé le marché »

Xavier Niel : « Free a réinventé le marché »

 

Free Mobile : 5 millions d'abonnés fin 2012, « un petit quart » avec l'offre à 0 €

Blocage de la publicité, première année de Free Mobile, concurrence... Xavier Niel revient sur toute l'actualité — et son lot de polémiques — de Free et de Free Mobile dans une interview fleuve au Figaro« Free a réinventé le marché », clame son trublion de patron.
Depuis son arrivée sur le marché le 10 janvier 2012 (lire : Free Mobile, un an de « bordel »), le nouvel entrant a été assez avare en informations. Il a fallu attendre la publication des résultats financiers d'Iliad, la maison mère, fin août pour savoir que Free Mobile comptait 3,6 millions d'abonnés au 30 juin. Même schéma deux mois et demi plus tard : à l'occasion de l'annonce des résultats trimestriels, Iliad révèle que le nombre d'abonnés s'élève à 4,4 millions de personnes au 30 septembre. Cette fois, Xavier Niel s'arroge le privilège d'annoncer que Free Mobile a « terminé l'année avec environ 5 millions d'abonnés ». On notera que la progression fulgurante qu'avait connu le nouvel entrant lors de la première partie de l'année s'est largement estompée. Un tassement qui peut s'expliquer par l'alignement des offres concurrentes, devenu de plus en plus compétitives au cours de l'année — H+/Dual Carrier, deux SIM... —, et par la qualité du réseau régulièrement décriée ?

« On ne recrute 5 millions d’abonnés qu’avec un service au meilleur niveau, surtout avec des offres sans engagement  ! », argue Niel à propos des critiques de l'UFC-Que Choisir. Et le patron de Free de mettre en cause les tests de l'association de consommateurs, alors que « l’étude de qualité de service des réseaux mobiles récemment publiée par l’Arcep place le service de Free Mobile à un excellent niveau. » S'il fait référence au bilan 2012 du gendarme des télécoms, l'appréciation que Xaviel Niel en a est pour le moins sujet à caution. Bien que les résultats du nouvel entrant ne soient pas médiocres, ils sont souvent inférieurs à ceux des autres opérateurs.

Le dirigeant met en avant l'allumage des fréquences 900 MHz au début du mois qui devrait améliorer la qualité du réseau dans les grandes agglomérations. L'opérateur avait prévu d'installer 2500 antennes en 2012, un objectif interne non atteint puisque l'on compte à l'heure actuelle environ 2270 stations, un élément que n'avaient pas manqué de faire remarquer la ministre déléguée à l'Économie numérique et le patron d'Orange (lire : Stéphane Richard gronde Free à propos du déploiement de réseau). Xavier Niel l'assure, « nous atteindrons le prochain seuil de notre licence (75 %) dès 2014 ». Il indique également que 50 % de la population est dorénavant couverte. Selon l'ARCEP, l'opérateur couvrait 37,3 % de la population début juillet.

Quant au fait qu'une grosse partie du trafic des abonnés de Free Mobile passe sur le réseau d'Orange, Niel garantit que « la part du trafic acheminée sur [son propre] réseau est en très forte croissance », aidée notamment par l'allumage des fréquences 900 MHz. « Free a un intérêt évident à déployer son réseau au plus vite », explique le patron à propos du contrat d'itinérance qui le lie à Orange et qui fait l'objet d'attaque de Bouygues et SFR — SFR a porté plainte contre Orange à Bruxelles pour« acquisition de contrôle conjointe de France Télécom sur Free Mobile ».


Concernant le litige sur les subventions perdu contre SFR, Niel indique qu'il va faire appel. Free Mobile avait attaqué l'opérateur au carré rouge cet été pour concurrence déloyale, arguant que les subventions — pratiques commerciales qu'il n'utilise pas —, étaient des crédits à la consommation« déguisés » qui ne respectent pas les « contraintes légales ». Le tribunal a donc rendu en première instance un avis contraire, condamnant Free Mobile à verser 300 000 € de dommages et intérêts à son concurrent. Qu'importe, selon Niel, « le consommateur, lui, a d’ores et déjà gagné, selon le jugement, le droit de se rétracter de son abonnement tout en conservant son smartphone. » Il fait référence à unattendu de la décision du tribunal :



« Attendu que le client qui a acquis le terminal et souscrit l’abonnement peut exercer son droit de rétractation sur le seul service d’abonnement (art. 5 des conditions générales), sans que cela remette en cause la vente du terminal ; que, de même, la résiliation anticipée de l’abonnement ne remet aucunement en cause la vente du terminal, lequel est définitivement acquis au client dès le premier jour »

Un attendu qui laisse à croire qu'il est possible d'acheter un téléphone subventionné — un iPhone 5 à 119,90 € par exemple — puis de faire valoir son droit de rétraction pour se délester du (cher) forfait. Une « faille » pour le moins intéressante qui ne serait en fait pas valable. SFR a indiqué à PC INpactque « la subvention du terminal accordée au client est conditionnée à la souscription du contrat de service », or, le forfait devient un contrat de service quand la période de rétractation a expiré. « Dans le cas cité il y a bien un contrat d'acquisition du terminal mais il n'y a pas de contrat de service (puisque le droit à rétractation est exercé) donc l'acquéreur ne bénéficie pas de la subvention », explique SFR. Des propos confirmés par l'UFC-Que Choisir pour qui cet attendu est « très normal ».

« Attaquer Free, c’est la certitude d’exister médiatiquement pendant quelques jours. Je pense qu’UFC l’a bien compris  !, s'exclame Niel au Figaro. Mais, à chaque fois qu’on nous tape dessus, nous faisons des recrutements records. » En parlant de recrutements, le patron de Free a enfin daigné donner une indication de la part des abonnements à son offre à 0 €. « Ces forfaits à 0 euro représentent un petit quart de la base », précise-t-il, démontrant par ailleurs que ceux-ci sont rentables car ils font partie d'une « économie plus globale où vous devez intégrer les recettes liées à la box, les dépassements, les appels internationaux [...] » 


Sur la 4G, Niel assure que son réseau est prêt et si besoin est, un accord a été trouvé avec SFR pour que celui-ci fournisse l'itinérance sur plus de 60 % du territoire. A contrario, Bouygues n'est pas en odeur de sainteté auprès du trublion concernant la 4G. Bouygues cherche à convertir ses fréquences 1800 MHz — avec lesquelles l'iPhone 5 est compatible — utilisées actuellement pour la 2G vers le réseau 4G. « Ce serait un énorme cadeau à l’opérateur le moins engagé dans la couverture numérique du territoire et la certitude d’une destruction massive d’emplois », peste le patron de Free. Des destructions d'emplois dont Free a été accusé, mais pour Niel, malgré les annonces de Bouygues et SFR, « le solde est positif » grâce à la création de 2000 emplois par son entreprise.

Niel balaye par ailleurs tout rapprochement avec Bouygues, expliquant qu'il y a assez de place pour quatre opérateurs. À l'instar de Fleur Pellerin et du directeur de l'Autorité de la concurrence, il se dit favorable à une mutualisation des réseaux. 



Bataille contre Google : « Nous sommes les seuls à avoir eu le courage d’établir un rapport de force »


Le patron de Free est également revenu sur l'affrontement qui l'oppose à Google sur les frais d'interconnexion (lire : Google et Free : une bataille à coups de tuyaux). Le fournisseur d'accès à Internet avait bloqué la publicité au début de l'année pendant quatre jours, un geste qui s'apparentait à un coup de semonce à l'encontre du géant de l'Internet (lire : Free déclare la guerre à Google). « YouTube n'est pas un ennemi, commence Niel. [...] Mais je ne crois pas que Net neutrality signifie "tout gratuit pour les gros acteurs". » Et le dirigeant de réitérer sa requête qu'il a formulé à maintes reprises ces dernière années : « On demande juste que soit payée la quote-part, sans marge, du réseau qui est utilisé chez nous, quand un acteur, seul, accapare une grande partie des capacités. » 

Le blocage de la publicité est une démonstration de force face à Google, la seule de la part d'un opérateur selon lui : « Nous sommes les seuls à avoir eu le courage d’établir un rapport de force. » Une opération assimilée à un « coup de com' » par Stéphane Richard, le patron d'Orange, pour qui une taille critique est nécessaire pour négocier avec Google. Ce qui ne serait pas le cas de Free d'après ce dernier. 

Quid des éditeurs de sites qui ont été les victimes collatérales de cette opération de Free en étant privés de leur principal ressource, la publicité ? « Il a été décidé de proposer une fonctionnalité limitant la publicité après le 1er janvier, au moment de l’année où il y a le moins de budgets publicitaires », se défend Xavier Niel qui ajoute qu'il va interroger ses abonnés sur son site dès demain « en leur laissant le choix d’avoir ou pas de la publicité lorsqu’ils naviguent sur le Web. » « Mais ça ne rebloquera pas les publicités, pour l’instant », spécifie-t-il.